
14 avril 2024
GROUPE: GRIFFON
TITRE ALBUM: De Republica
LABEL: Les acteurs de l’ombre
DATE DE SORTIE: 2024
On pourra intellectualiser les paroles de GRIFFON ou bien disserter des heures durant, sur la portée de leur propos, sur les recherches détaillées des mots et des phrases contenues dans ce livret majestueux de leur nouvel album portant le nom si pesant et néanmoins si parlant de vérité qu’est « De Republica » ; ( sachant que ce que nous vivons aujourd’hui peut à s’y méprendre, s’apparenter à une civilisation en fin de vie, à bout de souffle) , il ressort une chose plutôt stable et tellement injuste malgré l’évolution des sociétés : le peuple reste et restera toujours le dindon de la farce quoiqu’il en soit à la fin.
Et dans tout ce bourbier actuel où justement la guerre est dans tous « ces » états, cette cacophonie incompréhensible où les notes ne sont plus là que pour accompagner le néant , des groupes tels que GRIFFON permettent à ceux qui le souhaitent, de réfléchir, de se documenter et d’apprécier avec délectation une musique composée avec un raffinement rarement égalé ces dernières années, encore plus dans notre hexagone où se regarder le nombril est devenu le sport favori. Et tandis que le nivellement ruisselle vers les enfers au 666ème sous-sol , certains groupes comme GRIFFON, évoluent et leur poésie née dans une paix héritée de notre histoire si rouge de sang et de combats, sert à remettre en question le résultat de tant de sacrifices . Encore aujourd’hui quand tristement des peuples se meurent, les poètes en parlent et les consciences s’éveillent...ou sommeillent.
Mais ne nous trompons pas, la musique est là pour la musique, et rien d’autre.
En douze ans les parisiens se sont faits un nom, et ce troisième album est très certainement leur meilleur, non pas comme l’ont toujours annoncé tous les groupes de la Terre à chaque nouvelle sortie, mais parce que c’est vrai. C’est tellement vrai que même si l’illustration d’Adam Burke ne vous parle pas, il serait fort dommage que la musique black metal de GRIFFON quant à elle ne vous titille pas l’oreille interne.
A l’instar d’un Malevolentia avec « République » sorti en 2016, GRIFFON bouscule nos âmes avec une musique violente aux orchestrations puissantes et lourdes, dans laquelle les atmosphères font ressortir à chaque seconde quelque chose d’historiquement dramatique. Et que ce soit par le chant clair, et clairement chanté, ou bien par les hurlements rauques et démoniaques de Aharon, ou encore même les samples qui apportent une immersion parfaite dans le décor des parisiens ; cet album à la durée parfaite,( parce que plus de trente six minutes aurait été de la gourmandise et du gaspillage) , GRIFFON nous offre des émotions à fleur de peau parce que les titres sont extrêmement riches.
A dire vrai, dès les premières secondes de «L’Homme du Tarn », les samples, les voix, l’atmosphère vous plongent intégralement dans l’ambiance de l’album. Rappelez-vous le débarquement dans « Il faut sauver le soldat Ryan », le spectateur était dedans, eh bien GRIFFON réussit l’exploit de faire de même avec sa musique. Le black metal français du nouveau millénaire n’aura jamais brillé autant de sa noirceur que sur des albums de cette trempe. GRIFFON maîtrise à la perfection sa profondeur musicale et ses orchestrations pour donner en pâture une musique réellement impressionnante de puissance et relief.
On avance à pas feutrés à chaque début de titres, car on ne sait pas où GRIFFON va nous mener, et pourtant chaque morceau est une surprise, un plaisir. Quand on découvre les premières notes de « A l’Insurrection », comment ne pas succomber sous les premiers riffs, ou comment survivre à la puissance ravageuse des rythmiques écrasantes servant de barrières ou de barricades, tandis qu’encore une fois les orchestrations vous laissent sentir cette odeur de mort qu’il y a sur les champs de bataille. GRIFFON fait très fort sur ce titre également car à l’écoute de cette incroyable chanson, on sent une authenticité dans l’écriture et ce n’est pas nous qui pénétrons dans l’univers de GRIFFON c’est l’univers de GRIFFON qui nous entoure et que vous ayez les yeux ouverts ou fermés, vous voyez ce que vous écoutez.
Et alors qu’on pensait avoir écouté le meilleur de l’album , vient à nos oreilles « La semaine sanglante » où GRIFFON nous recentre avec des envolées de guitares proches de certaines folies de Stortregn ou de certains passages stellaires d’Arcturus, puis « La loi de la Nation » la bien nommée avec une mélancolie si cristalline qu’on se rend compte de la qualité de ce nouvel album.
Peu importe ce qu’ils pensent, c’est à leur musique qu’on apprécie GRIFFON et rien d’autre n’est important car seuls les actes comptent, tandis que les paroles ne se voient pas. Et puisque l’on parle d’acte, « De Republica » ce nouvel acte, s’impose de lui-même et la loi naturelle restera toujours la plus juste d’entre toutes.
Arch Gros Barbare
14/04/2024